Fête de la Sainte Trinité — Diocèse d'Annecy

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Fête de la Sainte Trinité

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    le 26/05/2024

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Après Pâques et la Pentecôte, c’est la fête de la Sainte Trinité ou le mystère de Dieu, communion d’amour, que les chrétiens célèbrent. Rencontre avec le P. Gilles Drouin, directeur de l’Institut supérieur de liturgie, Institut catholique de Paris. Cette année, la fête de la Sainte-Trinité est célébrée le dimanche 26 mai 2024. 

Que fêtent les chrétiens le jour de la Sainte Trinité ?

Nous célébrons le mystère de Dieu, qui est communion des trois personnes : Père, Fils et Esprit-saint. Nous fêtons l’unicité de notre Dieu qui en même temps n’est pas solitaire mais communion, circulation d’amour. La préface de la messe de la Sainte Trinité le dit avec un vocabulaire très précis : “Vraiment, il est juste et bon de Te rendre gloire (…). Avec ton Fils unique et le Saint-Esprit, Tu es un seul Dieu, Tu es un seul Seigneur, dans la trinité des personnes et l’unité de leur nature (…).” Nous rappelons notre foi en un seul Dieu, une seule substance en trois personnes, c’est la foi de Nicée (325). La fête de la Trinité, tout comme celle du Saint-Sacrement est une fête de dogme. Alors que les fêtes de l’Église universelle célèbrent l’unique Mystère du Seigneur, qui se développe, se diffracte en différents mystères, autour des deux foyers de l’année liturgique : celui de la mort et de la résurrection du Christ à Pâques ou celui de sa nativité à Noël. C’est au Moyen-Âge qu’on ajoute des fêtes de dogme à l’année liturgique. C’est-à-dire que leur contenu n’est pas directement lié aux mystères du Seigneur Dieu en Jésus-Christ, mais fonctionnent à partir de définitions doctrinales : le dogme trinitaire pour la fête de la Trinité, le dogme de la présence réelle pour celle du Saint-Sacrement. La fête de la Trinité semble trouver son origine dans le contexte théologique et spirituel de l’Angleterre médiévale. Elle s’est entendue à toute l’Église universelle et a été élevée au rang de solennité au début du XXe siècle.

Quel est le sens de cette fête ?

La position dans l’année liturgique de la fête de la Sainte Trinité la caractérise. Elle arrive juste après la Pentecôte, c’est-à-dire juste après la fête qui clôt le temps pascal. L’Esprit est celui qui scelle le mystère pascal du Christ dont désormais l’Église est dépositaire et témoin. Après ce cycle pascal, nous avons une fête qui nous dit qui est ce Dieu qui s’est fait si proche (Noël) et s’est donné pour l’humanité (Pâques). Cette place dans le calendrier n’est pas neutre. C’est comme un arrêt sur image. Dieu se révèle en Christ, et le Christ le révèle fondamentalement dans le mystère de sa mort et de sa résurrection et par le don de l’Esprit, ce qu’on appelle le Mystère pascal. La fête de la Trinité nous invite à contempler qui est ce Dieu, de toute éternité, le même qui s’est donné en son Fils. Cette fête, qui ne correspond à aucun évènement précis de la vie du Seigneur, n’a pas non plus de geste ou de rite particulier dans la tradition latine. En revanche, la réforme liturgique a considérablement enrichi le lectionnaire de cette fête avec trois évangiles, trois lectures pauliennes, ainsi que trois textes de l’Ancien testament. C’est nouveau et très intéressant en particulier pour le prédicateur. Pour l’année liturgique B, la lecture de l’Ancien Testament est tirée du Deutéronome avec la révélation de Dieu à Moïse au Sinaï. Pour l’année C, du livre des Proverbes. Dans ce dernier, la révélation du Dieu unique s’enrichit de celle de la Sagesse divine, pratiquement personnifiés. Ces textes, lus avec un regard de foi, préfigurent le mystère de communion, Communion du Père, du Fils et de l’Esprit, pleinement révélés dans le Nouveau testament. C’est très beau. Cette année (B), l’Évangile saint Matthieu (28, 16-20) reprend l’adresse de Jésus aux disciples : “Baptisez-les au Nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit”. L’année C, c’est l’Évangile de saint Jean (Jn 16, 12-15) qui est choisi et qui insiste sur le rôle de l’Esprit qui nous fait entrer dans la profondeur du mystère de Dieu : “Tout ce que possède le Père est à moi ; l’Esprit reçoit ce qui vient de moi pour vous le faire connaître”. Notons encore que le mot Trinité n’apparaît pas dans l’Écriture. Les lectures l’évoquent, bien sûr mais sans employer le terme. C’est un vocabulaire forgé par la théologie pour rendre compte de la foi, un vocabulaire que reprend le formulaire liturgique de la fête. Plusieurs proverbes populaires mentionnent la Trinité. Ils témoignent de la réception de la fête par le peuple chrétien En particulier dans une société chrétienne rurale traditionnelle.

Qu’est-ce que les fidèles sont invités à méditer ?

Il y a toute une spiritualité de la Trinité, je pense évidemment pour la période contemporaine à sainte Élisabeth de la Trinité. Très tôt, la foi et la spiritualité chrétiennes prennent conscience que Dieu n’est pas solitaire, mais qu’il est communion d’amour. C’est ce que dit à sa manière l’icône d’Andreï Roublev. Il y a quatre places autour de la table, qui est une table eucharistique avec la coupe et l’Agneau au centre. Mais la place de devant est vide : chacun est invité à participer à ce mystère ! Si nous sommes membres du grand corps dont la Tête, le Christ, est auprès du Père alors, la communion d’amour du Père, du Fils et de l’Esprit nous est ouverte, en particulier par l’Eucharistie ! Saint Augustin développe toute une méditation anthropologique de la Trinité. Si l’homme est créé à l’image de Dieu, alors les puissances de son âme la mémoire, la parole et la volonté sont comme des traces, des vestiges de la trinité qui structurent la personne humaine. Mais attention aux analogies superficielles, tout ce qui est ternaire n’est pas à mettre en relation avec la Trinité. Par exemple, il n’est pas très juste d’associer la sainte Famille à la trinité, même sous forme de reflet.

Le dogme a donné lieu à une iconographie très riche, qui en a beaucoup soutenu la méditation. En Orient, on retrouve les trois anges qui visitent Abraham, représentants de Dieu et très tôt interprétés comme figure trinitaire. En Occident, les images de la fin du Moyen-Âge sont parfois étranges avec le Père qui porte la croix du Fils et l’Esprit-saint qui souffle entre les deux. C’est ce qu’on appelle un Trône de grâce où l’on perçoit l’amour du Père qui va jusqu’à donner son Fils. Je pense aussi à l’architecture cistercienne, avec ses trois fenêtres explicitement voulues et interprétées par les pères cisterciens en un sens trinitaire. Prier devant ces trois ouvertures tournées vers le l’Orient véritable est très efficace, au meilleur sens du terme. J’en ai moi-même fait l’expérience. Ces éléments sensibles peuvent nous aider à entrer, un peu, dans le mystère de la Trinité.

Qu’est-ce que la Trinité dit de l’homme ?

Dieu n’est pas solitaire. Il est communion d’amour et cette dernière nous est offerte en partage. Réciproquement, c’est la contemplation du mystère de Dieu tel qu’il s’est révélé qui permet de comprendre et de dire qui est l’homme. Le cardinal Lustiger aimait à partager son éblouissement de constater que c’est la révélation du Dieu chrétien qui a permis de forger la notion de personne, être unique et relationnel tel que la modernité la conçoit, ou de passer de la notion d’individu, être quasiment interchangeable à celle de personne être unique et en relation. Regarder la façon dont Dieu se révèle dit ce qu’est l’être humain, son identité profonde : un être unique, défini par sa capacité d’entrer en relation avec les autres. Saint Thomas le dit à sa manière quand il définit les personnes trinitaires comme des relations subsistantes. C’est la relation qui fonde et caractérise la personne.