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La solitude

La solitude n'est pas l'isolement !

Mon amie la solitude

Le Père Joseph vit quasiment en ermite au bout de la route de Notre Dame de la Gorge aux Contamines Montjoie. Il est venu s'installer là après sa retraite de chauffeur de bus à Annecy et il est resté. Il était prêtre ouvrier et du jour au lendemain, il n'a plus croisé que quelques promeneurs. Comment vit-on une telle solitude ?

LA SOLITUDE N'EST PAS L'ISOLEMENT

Je suis là depuis dix-sept ans, je n'ai jamais souffert de solitude. Je fais la différence entre solitude et isolement : l'isolement a un aspect physique, psychologique et géographique. C'est une notion lourde tandis que la solitude a un côté plus positif. Je vis la solitude avec joie, j'ai depuis longtemps éliminé l'idée de « supporter » la solitude. Je l'ai apprivoisée, elle est un cœur à cœur avec Dieu, une disponibilité afin d'être ouvert à tous et à tout.

LA SOLITUDE IMPRESSIONNE LES GENS

Quelqu'un me disait un jour : « Pourquoi tu perds ton temps avec tes champignons même pas comestibles ? »  Je me souviens qu'après réflexion, j'avais répondu qu'ils m'apprennent tou­jours quelque chose sur l'homme : « Un champignon toxique pousse au milieu des cèpes de Bordeaux. Ils se côtoient en symbiose. Ils ne se battent pas eux ! »  Cette manière de voir l'avait interpellé. J'ai tellement rencontré de monde dans mon métier. C'est comme quand vous marchez dans les rues piétonnes en ville : vous devez presque jouer des coudes, pas un regard, pas un sourire, pas un bonjour... Là, je goûte la vraie solitude alors qu'ici, même s'il y en a peu, je vis de vraies rencontres et je les porte dans mon cœur et elles nourrissent ma prière.

L'EXPÉRIENCE DU SILENCE

Parfois, quand je reçois un groupe pendant quel­ques jours dans la maison, je remarque que le silence fait peur. Au cours d'un repas, quand "un ange passe" il ne se passe pas cinq secondes sans que quelqu'un l'interrompe.

Pourtant le silence est un besoin. Il nous permet de retrouver le poids de l'essentiel. Ça me fait penser à l'expérience que je fais deux trois fois par hiver. Les nuits où il a neigé, où tout est complètement blanc, je goûte un silence différent. Je sais qu'il a neigé avant d'ouvrir les volets. Ces matins-là, le silence est vraiment « rien » Quelle merveille !

LA PAROLE ESSENTIELLE

Au fil des ans, j'ai appris à observer, à écouter. Les autres m'apprennent beaucoup. Je me sou­viens d'un groupe en session dans la maison. Il travaillait de l'hébreu. La formatrice évoquait un mot imprononçable dans notre langue parce qu'il est à peine « soufflé ». Cela m'avait évoqué ce passage du premier livre des rois où le Seigneur n'est ni dans l'ouragan, ni dans le tremblement de terre, ni dans le feu... Mais dans une brise légère (1Rois 19,11-13) Dieu semble dire de prêter attention aux petites choses du quotidien, ce qui ne fait pas de bruit.

UNE CONVERSATION INTÉRIEURE PERMANENTE

Je remarque la présence quasi constante de Dieu là où je ne l'attends pas. Surtout à travers les personnes que je rencontre. C'est comme si le Seigneur me demandait d'être attentif d'avance au risque de le croiser... Dieu a beaucoup d'humour : Il est le Dieu caché qui me surprend sans me fâcher. C'est une conversation permanente.

Je l'ai trouvé par exemple dans un cadeau d'une dame un peu artiste qui m'a offert une broderie que je pouvais garnir de lavande. Je ne savais pas qu'en faire... Et puis il m'est venu l'idée d'en faire un doudou ! Je l'ai accrochée à la tête de mon lit et désormais, j'associe chaque graine aux rencontres que j'ai faites... Je m'endors avant de les avoir toutes égrainées, trois-cent-soixante-cinq jours par an !

DES PERSONNES « CORPS DU CHRIST »

Il est fréquent que je compare des personnes au Christ. Quand je vois ce qu'elles portent et supportent parfois dans leur vie, le poids de leur souffrance...
Il n'y a qu'une personne référence pour porter avec elles tant de poids : le Christ.
Je n'en connais pas d'autres. Elles sont en train de vivre sa passion, pas moins.

PRÊTRE DEPUIS 50 ANS...

J'ai été ordonné le 30 mars 1963. J'ai fêté 50 ans de sacerdoce le 21 avril dernier [2013] aux Contamines, avec les paroissiens du coin. J'ai été heureux de fêter l'événement avec les autres. 50 ans au service du Christ. A l'époque de mon ordination, j'avais choisi un passage de Jérémie comme image d'ordination « Seigneur, tu m'as séduit, et je me suis laissé séduire » (Jr 20,7). Aujourd'hui, je le mets au présent : quelle chance, quelle grâce de vivre cette solitude ! Cela m'est donné sans que j'y sois pour rien !

(P. Joseph Rey)

La Page de Saint-André N° 3 - (Juillet-août, septembre 2013) - Diocèse d’Annecy - « Prendre le temps de se ressourcer »

Pour les 60 ans de sacerdoce de Joseph, nous nous retrouverons pour une soirée de louange et d'action de grâce

le vendredi 31 mars 2023 à l'église des Contamines.